Cet article revient sur des travaux que j'ai réalisés en utilisant la facilitation graphique dans le monde des Ressources Humaines. Il s'inscrit dans une série de posts retraçant les différentes thématiques que j'ai pu aborder en dessins. L'ensemble des thèmes est disponible ici.
☕️ Attention, cet article est long (et encore j'ai fait une sélection). J'aime bien bavarder, prenez donc un thé !
J'ai écrit précédemment un article sur la facilitation graphique et le management que je vous invite à lire et où je laissais entrevoir des problématiques autour de la transformation des entreprises. Cette dynamique de transformation touche aussi naturellement le milieu des Ressources Humaines en trame de fond mais aussi la logique de gestion des talents, la place de la technologie, la place des seniors, les lieux de travail, tout autant d'éléments qui donnent également à réfléchir sur le futur des RH.
La transformation, avant tout une histoire d'hommes et de femmes
À l'ère du digital, on ne peut toutefois pas déroger aux fondamentaux : le changement, c'est avant tout humain :
Le changement ne se décrète pas, il s'incarne et se repose avant tout sur des hommes et des femmes. Pas besoin d'aller plus loin pour constater l'importance du management, un management intelligent et adapté à chacun et chacune. Un management qui est tout sauf impatient, un management qui est conscient qu'il faut prendre le temps pour le changement. Enfin, il s'agit, pour entreprendre pour demain, de conjuguer réalités économiques et prise de risques, pour être à la fois innovant et pérenne.
Qui dit transformation, dit aussi connexion. On en vient parfois à se sentir partagé entre un désir de connexion permanent et le ras-le-bol nous invitant à nous débrancher complètement venant au choix d'un burn out, d'un bore out ou d'un brown out (je vous épargne les autres variantes). En ce sens, la loi déconnexion peut permettre de rétablir l'équilibre pro et perso et de faire face à l'infobésité qui nous entoure (et parfois nous hante). Pas besoin toutefois de ne faire reposer cet équilibre incertain seulement sur une loi ! Le rôle ici des RH est non seulement d'être en mesure de (très) bien connaître ses collaborateurs mais aussi d'en faire des acteurs de leur transformation.
La transformation, c'est comme on vient de le voir de plus en plus lié à cette porosité entre les vies personnelles et professionnelles et l'équilibre de vie que cela suppose :
La qualité de vie au travail (QVT pour les intimes) permet l'engagement des salariés et contribue par conséquent à une entreprise performante et innovante. L'équilibre professionnel et personnel peut être appréhendé à 3 niveau différents : celui de l'individu, de l'entreprise et de la société.
Au niveau de l'individu, l'interpénétration des vies personnelles et professionnelles a deux principaux bénéfices : le transfert de compétences direct et la quête de sens, thème ô combien d'actualité ! Dans cette quête d'équilibre pro / perso, le numérique n'est ni allié, ni un ennemi, c'est seulement un outil. Comme pour tous les outils, c'est avant tout la culture d'entreprise et les usages qui y sont liés qui prévalent. Les principaux points de vigilance au niveau de l'entreprise sont le présentéisme, encore bien ancré dans notre cher pays, cette fameuse porosité que l'on vient d'évoquer et l'égalité hommes-femmes. Au final, on pourrait dire simplement que les entreprises se doivent de fonctionner et de raisonner en toute intelligence, en proposant de la souplesse à leurs employés et en prônant la responsabilisation individuelle et collective.
Gérer les talents, tout un talent !
Il n'y a pas de formule magique dans la gestion des talents mais l'ingrédient secret ici encore réside dans le fait de rendre acteurs les collaborateurs :
Pour un parcours personnalisé, rien de mieux que de faire des collaborateurs des entrepreneurs de leur formation avec comme principale ligne conductrice l'épanouissement. Le métier de demain n'est plus un mais plusieurs et il s'agira de jongler entre plusieurs métiers avec inévitablement, en filigrane, un savoir être surdéveloppé.
Qu'il s'agisse d'expérience candidat ou d'expérience collaborateur, le parallèle avec le monde du marketing peut également nous éclairer :
Dans le marketing, on parle de moments de vérité qui sont des échanges mémorables entre un consommateur et une marque. Ces moments de vérité permettent d'ancrer une réalité pour le consommateur et in fine d'orienter ses choix. Ils peuvent intervenir à différents niveaux : au moment de la prise de conscience de son besoin, de la prise d'information et de la décision d'achat, de l'acte d'achat en lui-même, de l'utilisation du produit ou service ou encore du partage d'expérience.
Aujourd'hui, l'environnement concurrentiel et les difficultés de recrutement qui en découlent poussent les recruteurs à changer de paradigme. Le candidat a maintenant le choix et c'est à eux de créer des moments de vérité à travers la marque employeur. Vont rentrer en ligne de mire notamment la localisation du poste, son intérêt, la rémunération qui y est associée, le mode de management, l'équilibre vie pro / vie perso qu'il permet et l'ambiance qui y règne.
Pour travailler sa marque employeur, il est tout d'abord question de répertorier les atouts de l'entreprise à valoriser, en interrogeant notamment les collaborateurs puis de rendre visibles ces marqueurs RH tout en veillant à rester authentique. Aucun intérêt à surpromettre sous risque de voir ses collaborateurs dépités et démobilisés !
Au final, voici globalement quelques axes de travail à envisager :
Il est encore toujours plus question aujourd'hui d'engagement, de motivation et d'implication des collaborateurs et pour cela rien de mieux que de donner du sens (du vrai !) dans le travail. Il est nécessaire que les collaborateurs se sentent bien dans leur poste mais aussi qu'ils orientent leur travail avec le client final au centre pour créer le plus de valeur possible in fine. Avec cette philosophie, plus de compétition mais de la coopétition, mettant à profit l'intelligence collective.
RH et technologie, entre risques et opportunités
Si les RH sont avant tout un enjeu humain, la technologie vient s'y immiscer et s'y trouve de plus en plus prégnante. Un dosage à savamment orchestrer pour garder l'humain au centre.
Les choix autour de la place des technologies sont complexes et tout autant déterminants. La technologie est et doit rester un outil. Le travail, de manière générale, se trouve infiltré par les technologies. À nous de choisir la posture que nous souhaitons adopter : résister, subir ou maîtriser ? Les DRH se trouvent naturellement garants des équilibres entre humain et technologie. Avant de considérer des enjeux technologiques, ce sont d'abord des enjeux culturels qui doivent être considérés. L'outil se doit d'être au service du lien et non le court-circuiter.
La place des seniors au travail
Les personnes ne peuvent s'appréhender de manière générique dans le monde du travail comme ailleurs. Les enjeux et dynamiques propres aux seniors sont à intégrer dans les logiques de RH (vous retrouverez des réflexions complémentaires dans cet article global traitant de l'inclusion) :
Au niveau législatif, la réforme des retraites redessine une certaine forme de pacte social qui impacte naturellement les séniors. Cette population constitue déjà aujourd'hui un des plus bas taux d'emploi en France. Une appellation générique qui caché en réalité de nombreuses disparités bien au-delà des stéréotypes : les vécus ont tendance à être invisibilisés et les disparités territoriales parfois occultées.
Loin d'être un état figé, être sénior, c'est avant tout une transition qu'il est important de pouvoir anticiper. Il s'agit de conjuguer intelligemment les apports de l'expérience cumulées tout au long de la carrière avec les déséquilibres à venir et pénibilités associées. L'aménagement paraît être le maître-mot : tant au niveau du vécu physique que des aspirations, besoins et envies pour la suite. Les envies peuvent se trouver à l'épreuve des capacités et c'est à l'entreprise de proposer des solutions pertinentes : activité dégressive progressive, reconversion, mécénat de compétences ou transmission de manière générale. L'enjeu ici est de percevoir le plus tôt possible les signaux faibles, avec par exemple un bilan professionnel et personnel dès 45 ans.
Comme mentionné plus haut, les stéréotypes sont nombreux pour les séniors : ils auraient plus de problèmes de santé, ils coûteraient trop cher à leur entreprise, ils seraient non seulement plus lents et moins efficaces mais aussi totalement perdus avec la technologie ! Ces stéréotypes, même s'ils sont de plus en plus obsolètes vont conditionner également les carrières. Les séniors sont au contraire à voir comme des atouts, forts de leur expérience précieuse à valoriser et à transmettre. L'âge ne doit pas constituer un non-sujet et il est important de développer à la fois une approche globale et personnalisée aux parcours qui se dessinent.
Le modulable ou l'avenir des lieux de travail
Les nouvelles pratiques et nouvelles façons de travailler impliquent des repenser les lieux de travail :
Repenser les lieux de travail c'est réduire au maximum les frictions du quotidien liées à la mobilité et aux horaires pour offrir plus de fluidité aux collaborateurs. Il s'agit de proposer un savant mélange de nomadisme et d'espaces adaptés (et adaptables) à l'intérieur de l'entreprise. Le principal maître-mot : le bonheur ! Et cette intention est loin d'être innocente (et vaine) : un collaborateur heureux, c'est aussi un collaborateur plus productif. Pour ce faire, il est du ressort de l'entreprise de stimuler les compétences, tout en offrant un espace de liberté propice au travail collaboratif.
Quel futur pour les RH ?
Avec tous ces chamboulements, on peut se demander à quoi pourra ressembler le futur des RH. Voici donc quelques éléments de réponse glanés lors l'événement Future of HR & digital transformation organisé par le Hub Institute :
Si vous voulez parcourir le mini-site regroupant vidéos, tweets et dessins, c'est par là. Petite mise en bouche : on y parlait du rôle de la confiance dans les RH, de la vision stratégique des RH, des nouveaux métiers et compétences dans les RH, de la marque employeur, de nouvelles stratégies d'identification des talents, de la transformation du parcours de recrutement, de nouveaux leviers pour développer l'engagement, de la diversité, de l'innovation digitale dans la gestion des talents, de la structuration des formations, de l'apprentissage demain, des compétences des DRH, du rôle de l'exécutif et des DRH, d'initiatives pour former les leaders de demain, de start-ups et de disruption dans les RH, de la structuration de l'innovation et du bonheur au travail.
Après avoir entrevu ce panorama global, je vous propose un point de vue plus spécifique axé sur l'ancrage et la mobilité avec le résultat d'ateliers menés par des étudiants du CELSA et l'association Univers RH. On retrouve ici une synthèse de différents points vu précédemment concernant la gestion de talents et les espaces de travail :
La dimension RH a été abordée ici sous 4 grands angles : celui de la culture d'entreprise, des savoirs, informations et données, de la montée en compétence des managers et des nouveaux espaces de travail.
La culture ou plutôt les cultures d'entreprises sont de plus en complexes et dépendent notamment de la culture du pays. Cette culture d'entreprise a une incidence directe sur la marque employeur qui elle même va jouer sur l'attractivité d'une entreprise. Attention toutefois à des cultures brandies comme des étendards : les valeurs proclamées peuvent parfois se révéler très différentes des réalités vécues. La question alors se pose : peut-on avoir trop de culture d'entreprise ? Pourrait-elle être un frein à la gestion des talents ?
L'entreprise est façonnée par la communication et au même titre que la culture, elle est de plus en plus complexe au sein des organisations. Ces nouvelles façons de communiquer questionner le rôle et la fonction RH. On ne peut pas nier l'influence des relations affinitaires qui sont partie intégrante de la vie en entreprise. La fonction RH devient ainsi un savant mélange entre process et relation, faisant des RH des médiateurs. Ce renouvellement de la fonction RH l'amène également à gérer la diversité et à faire grandir les collaborateurs de manière individuelle et individualisée.
Pour s'adapter à ces nouveaux modes relationnels, de nouveaux espaces de travail sont nécessaires. Ces espaces devront conjuguer décloisonnement, nomadisme et virtualisation mais pas n'importe comment ! Les espaces devront avant tout être pensés au service de la culture et des usages et pas dans un effet de mode. Évidemment, comme beaucoup de questions soulevées ici, tout cela ne pourra se faire sans un bon accompagnement au changement.
Pour suivre mes aventures et réflexions dessinées, vous pouvez vous abonner juste ici :